HIBIKI (Ref. JAZZDOR 0001/20)

Né de l'association de trois musiciennes d'origine japonaise mais de générations et de cultures musicales très différentes (la pianiste Sakoto Fujii, en provenance de Tokyo ; la joueuse de marimba et de vibraphone Taiko Saito, installée à Berlin ; et la percussionniste Yuko Oshima, résidant à Strasbourg), SAN ("trois" en japonais) s'est donné comme projet de fabriquer avec ces différences un discours commun, qui s'appliquerait moins à en résoudre les conflits latents qu'à intégrer leurs dynamiques en une harmonie toujours menacée. A partir de compositions jouant sur des effets de contrastes appuyés entre des plages de silence, où le moindre geste prend un relief saisissant, et des montées en puissance collectives pleines de tumulte et de rythmes emmêlés, le trio développe une musique à la fois théâtrale, chorégraphique et fascinante.

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Un bruissement de balais et de bois flottés annonce le pincement des cordes du piano, le vibraphone répond. L'ensemble s'installe, l'écoute s'installe. Ecritures et improvisations se mêlent, Satoko Fujii signe trois pièces à la suite.

C'est bien l'écoute mutuelle qui fait merveille ici et les contrastes saisissants de dynamiques variables et maitrisées construisent au fur et à mesure un langage commun. Le jeu contrapuntique de la pianiste structure souterrainement ce sabir imaginaire né du récit construit par chacune et tout le monde fait son affaire du rythme.

Si l'une vit à Tokyo, l'autre à Berlin et l'autre encore à Strasbourg, leur langage musical transcende les frontières, étire les champs esthétiques, éveille les sens, bouleverse les esprits.

Le son de ce trio est assez unique et si l'instrumentarium est plutôt inhabituel pour un trio et tant mieux, c'est que l'univers percussif de l'ensemble bouscule les formes établies, tout un révélant au gré des pistes qui défilent, un chant intérieur puissant qui laisse des traces après l'écoute. On sort de là rassasié et heureux, comme après un bon concert. Tiens, justement, toute cette musique fut enregistrée « live » et ce n'est pas la moindre des qualités de cet album !

Philippe Ochem