Dès sa commercialisation au début du XXe siècle, le disque propose les discours d’un grand nombre de discours d’hommes de pouvoir, de leaders, penseurs ou activistes politiques. Objet de diffusion large mais à la place domestique intime, le disque fut un extraordinaire ferment d’omniscience. Alors qu’il documentait, puis inspirait les mouvements extrêmement changeants de la musique, il fit de même, parallèlement, pour la pensée politique. Objet de propagande ou de contre propagande (nombre de partis politiques ont, tout au long du siècle passé, créé leurs structures de production), le disque représente une écoute aussi personnalisée qu’humainement partageable (à l’inverse de l’anonymat du streaming). La parole y rejoint le chant. Les gens de musique l’ont largement utilisé pour affranchir plus facilement encore l’alliance musique-politique ou pour préciser la musique comme état de contestation. Le disque a bigrement contribué à diverses incarnations et représentations de la lutte des classes comme à la diffusion des idées, fussent-elle dansées.
Les participants :
- Jean Rochard : Fondateur et producteur en 1980 des disques nato (nom d’un cousin de Géronimo et d’une chatte siamoise). Auparavant, en 1976 (pour rendre service à un copain), il commence à écrire sur la musique dans diverses publications. À partir de 1978, il organise des concerts dans le village de Chantenay-Villedieu puis plus tard à Minneapolis. Les disques nato demeurent son cœur d’ouvrage depuis leur naissance. Une certaine spécificité des albums à thème les caractérise… Depuis 2005, pour poursuivre l’aventure, il s’est associé à Christelle Raffaëlli.
- Élise Petit : Maîtresse de conférences en musicologie à l’Université Grenoble Alpes et docteure en Histoire de la Musique et agrégée de Musique, elle a consacré sa thèse de doctorat en Histoire de la Musique à l’étude des politiques musicales en Allemagne, sous le IIIe Reich et durant l’occupation alliée. Ce travail constitue la première analyse comparée des politiques de création artistique et des usages de la musique par des régimes antagonistes en Allemagne, de 1933 à 1949. Il mène à repenser la création musicale du XXe siècle à l’aune d’enjeux politiques liés à la guerre froide. Elle poursuit un projet d’analyse détaillée des usages de la musique dans les camps de concentration et dans les centres de mise à mort.
- Billie Brelok : Après un premier EP plutôt artisanal et 3 vidéos brillantes (dont "Bâtarde"), la rappeuse franco-péruvienne de Nanterre a réalisé un nouvel opus, double album, baptisé Gare de l'Ouest. "Engagée et féministe, ce sont des mots pour lesquels j’ai beaucoup d’estime. Pour moi, féministe, ça évoque l’émancipation, mais cette étiquette peut vite devenir les quatre murs dans lesquels tu te laisses enfermer… Parfois je me dis, que je suis juste un détail, que c’est surtout l’époque qui est féministe. Et je regarde ça avec un œil plutôt optimiste !". Billie Brelok a été l’invitée du groupe Ursus Minor et a participé au disque 13’12 contre les violences policières.
- Jonathan Thomas : Chercheur-associé au CRAL (EHESS/CNRS). De formation musicologique, il s’intéresse à la dimension sonore des pratiques politiques dans une démarche interdisciplinaire. Il a publié Jean-Marie Le Pen et la SERP : le disque de musique au service d'une pratique politique, De la musique pour le peuple : une proposition d'analyse des premiers disques folkloriques du Chant du Monde et Militer en chantant, sous l'œil de la police parisienne des années 1930 : une exploration du fonctionnement politique du chant.
Conservatoire de Lille
Place du Concert
59000 Lille
15h-17h (accès par la Place du Concert) Entrée gratuite - Salle C1/10
Informations et réservations : resa@muzzix. Info
Cet événement est programmé par le collectif Muzzix dans le cadre du Temps fort des musiques improvisées et expérimentales en Hauts-de-France.
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