Le lien invisible et précieux entre toutes ces choses qui semblent en surface séparées, il le faisait, le lien était malaxé, cuisiné, affiné, l'entretenant par toutes sortes de recettes prises dans des imaginations tirées d'écrits anciens, modernes, mélangés, digérés, par exemple, ou autrement.
Qui en France a fabriqué un lien aussi délicat entre situations de vie, accidents impromptus, théâtre, réunions, aller chercher une bouteille de soda à un inconnu qui ne boit pas d'alcool, mettre un instrument dans les mains à trois heures du matin à un musicien de passage, intervenir en poussant légèrement quelqu'un à le faire quand une discussion ou un débat est bloqué soit par quelqu'un qui tire trop la couverture à soi, aide permanente aux autres, réflexion intense, transcription graphique et précise d'une pensée, rendre l'abstrait concret et vice versa au risque d'être très mal compris, lien souterrain entre pénombres et lumières, présence radicale au monde et ses curiosités dévalant comme une cascade, ses monstruosités aussi, à la joie, présence radicale au monde, distribution d'haltères vitamines, ou fioles de vide au gens de passage.
La fonderie est un lieu qui n'a aucune définition, à l'extrême opposé des lieux "faits pour", alors comment continuer ses gestes, ses énergies, ses puissances discrètes, présence aux hasards, au creux, au vide, à la délicatesse, à la douceur, au silence, la grâce, à la réparation, celle qui a lieu quand d'un coup elle nous apparaît.
Apparition, disparition, François par ta subtile boîte à outils récoltée de Sarajevo à Redayef, alors qui la comprendra solidement, sans projections, sans fantasmes, sans prises de pouvoir, sans sacralisation inutile, parc e que c'est le quotidien qui offre tout cela, c'est ce quotidien qui nourrissait François, et il cherchait à le retranscrire, avec une oeil affiné, aigu, un œil d'ange.
D'autres qui sacralisent diraient qu'il rendait le quotidien magique, je ne crois pas, c'est comme le mot création, à tout va, je n'y crois pas, on reçoit, et on distribue aussi délicatement que l'on pense avoir puissamment reçu, c'est de la mécanique horlogère, peu la trouvent, François se protège des projections des autres, pleines de fantasmes inutiles, il s'isolait, et il apparaissait quand son armure était assez solide pour remonter à la surface, parfois il n'avait pas besoin d'armure, parce qu'il faisait, parce qu'il déplaçait un matelas ou un banc, et dans ce cas, personne ne venait lui fouiller le ventre, avec des phrases qui enferment, soulignent, mais ne font pas avancer l'avancée du matelas dans le petit coin, là-bas, tu vois le petit coin là-bas ?
Fantazio
le 7 décembre 2022
Photographie empruntée à Ouest France
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